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13 janvier 2025 1 13 /01 /janvier /2025 11:38

Karrikell :

Voici un texte de René Kerviler (texte 1873) au sujet de l'origine du port de Saint-Nazaire. Comme d'habitude dans Karrikell je l'ai aéré et expurgé de notifications peu intéressantes pour une lecture simplifiée .

 
 
 

Je l'ai découpé en onze parties.

vous pouvez retrouver l'original ici :  René Kerviler - Armorique et Bretagne

 

J'ai transformé les notes de bas de page  en paragraphe inclus dans le texte mais en gras italique.

Ce qui est en bleu est un ajout de ma part. Je l'ai agrémenté de photos ou images .

 

 

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Tables des matières lien

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Histoire de la fondation du port de Saint-Nazaire - René Kerviler (1/10)
Histoire de la fondation du port de Saint-Nazaire - René Kerviler (1/10)

Cette étude a été publiée pour la première fois comme premier chapitre de la grande Notice sur le port de Saint- Nazaire, publiée par les soins du Ministère des travaux publics au tome v de la l'Atlas des ports maritimes de France. Tirage à part, Paris, Imprimerie

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karrikell : voici un menu que j'ai créé pour cette publication un peu longue  :

 

  1. la mauvaise navigabilité de la Basse Loire inquiète depuis le XVIIeme siècle
  2. Travaux des Etats de Bretagne : les phares du commerce et d'Aiguillon (1756)
  3. 1836-1837 : Lutte entre Paimboeuf et Saint-Nazaire pour être le nouveau port de Nantes
    1. Atouts de Paimboeuf
    2. Saint-Nazaire contre attaque
  4. 1837 : Le Ministre des travaux publics demande aux ingénieurs d'étudier les deux avant-projets pour choisir en pleine connaissance de cause
  5. M.Plantier expose le projet de Saint-Nazaire
  6. août 1837 : Le Conseil Général de Loire-Inférieure vote pour Saint-Nazaire
  7. 21 avril 1838 : Le ministère entérine Saint-Nazaire  mais .... demande un dernier avant-projet
  8. Nouveau projet de cabrol et Plantier, janvier 1839
  9. Le projet s'enlise en discussions pendant 3 ans , Nantes et Paimboeuf s'opposent au projet !
  10. Réveil du projet par Jules de la Gournerie, septembre 1839
  11. Le ministre vient à Saint-Nazaire, août 1840
  12. 1841 La marine militaire appuie le projet
  13. Le projet est entériné définitivement le 2 septembre 1842 malgré un dernier assaut de Paimboeuf contre le projet en mai 1842
  14. Dix huit mois de polémiques, les Nantais réclament des modifications du projet
  15. La loi du 18 juillet 1845 entérine définitivement le projet en votant son budget

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5. -Les avant-projets du premier bassin de Saint-Nazaire. - MM . Plantier et Cabrol ( 1836-1845) .

 

la mauvaise navigabilité de la Basse Loire inquiète depuis le XVIIeme siècle

 

A peine le môle d'abri et de débarquement était-il exécuté que de nouveaux besoins se manifestèrent plus impérieux ; mais cette fois il ne s'agissait plus d'un simple intérêt de clocher : la situation maritime et commerciale du port de Nantes menaçait d'être compromise si on ne portait un prompt remède aux détestables conditions de la navigation dans la basse Loire.


Depuis deux siècles déjà, la difficulté de faire monter les navires de trois ou quatre cents tonneaux jusqu'à Nantes , à 60 kilomètres de l'embouchure de la Loire, au travers de bancs de sable très mobiles , préoccupait vivement les armateurs et tous les négociants.

 

On trouve des traces très accusées de ces inquiétudes dès le milieu du XVII° siècle dans une curieuse description de Nantes datée de 1646 :

 

« Il n'y a qu'une seule chose à objecter ou plutôt à désirer , »

disait le chroniqueur ,

" pour le comble des avantages et commodités qu'a la ville de Nantes pour la navigation , qui est que le canal de la rivière fût assez profond depuis l'embouchure de la mer jusque dans sa Fosse pour y amener les grands vaisseaux "

 

On était en effet obligé, dès cette époque, de décharger en allèges ou en gabarres une partie de la cargaison des navires de 300 tonneaux pour pouvoir leur permettre d'accoster .

 

Une lettre du 5 mai 1663 adressée par Louis XIV au maréchal de la Meilleraye, gouverneur de Bretagne, nous apprend même que des Hollandais avaient proposé à cette époque la construction d'un canal pour faire "monter jusqu'à Nantes des vaisseaux de tout port, chargés".

On demandait pour cela une imposition de 10 sols par tonneau.

Un peu plus tard, l'éminent ingénieur Vauban, dont on retrouve la trace sur tous les points de la France et particulièrement de nos côtes, s'occupa dans le même but d'un projet de bassin à flot au bas de la Loire, à Paimboeuf;  mais nous ne sachions pas que ce projet ait jamais reçu de commencement d'exécution.

 

Vers le même temps, une compagnie hollandaise offrit à Louis XIV  de rendre la Loire constamment navigable au moyen de digues submersibles , demandant en dédommagement que "le port de Saint-Nazaire lui fût ouvert en franchise";

 

et, pendant tout le XVIIIeme siècle, on voit les Etats de Bretagne , vivement sollicités par les plaintes du commerce sur l'ensablement progressif de la Loire, charger leurs ingénieurs Lafont, Thévenou, Abeille, de Caux, Charron et Lepelletier , de visiter la rivière en 1718, 1725, 1735, 1738, 1742 et 1746, pour étudier le remède à un si déplorable état de  choses.

(Nous pouvons encore ajouter d'après un mémoire de la Chambre de commerce de Nantes,daté de février 1838, qu'en 1735 les négociants de Nantes sollicitèrent la création d'un bassin à l'embouchure de la Loire, comme le moyen le plus efficace d'aider au développement du commerce de cette ville.)

 

 

Aussi M. l'ingenieur de la Gournerie pouvait il affirmer, dans un mémoire imprimé en 1840,  qu'un siècle auparavant, à l'époque de la plus grande prospérité de Nantes, les navires étaient obligés de rompre charge à Paimboeuf comme à cette époque.

 

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Travaux des Etats de Bretagne : les phares du commerce et d'Aiguillon (1756)

 

Sous le gouvernement du duc d'Aiguillon, l'ingénieur des Etats de Bretagne, Magin, entreprit de sérieux travaux d'amélioration dans la rivière; mais ce qu'il a fait de plus durable, ce sont les deux phares qu'il construisit dans la paroisse de Saint-Nazaire, à l'embouchure de la Loire, et qui porte encore les noms qu'il leur donna, à savoir  : Phare du Commerce et phare d'Aiguillon.

 

Depuis ce temps, bien des projets ont été mis à l'étude, bien des travaux ont été exécutés; mais la navigation de la basse Loire est toujours aussi difficile pour les navires d'un certain tonnage. La construction de la section de canal latéral, actuellement en exécution de Paimboeuf au Pellerin , apportera sans doute le remède si longtemps désiré.

 

Phare du commerce (image google maps)

Phare du commerce (image google maps)

Phare d'Aiguillon (Par Whiteredge — Travail personnel, CC BY-SA 4.0, https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=43215742)

Phare d'Aiguillon (Par Whiteredge — Travail personnel, CC BY-SA 4.0, https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=43215742)

1836-1837 : Lutte entre Paimboeuf et Saint-Nazaire pour être le nouveau port de Nantes

 

En 1836, on s'effraya de voir les navires étrangers s'éloigner de plus en plus du port de Nantes, dont la décadence s'accentuait menaçante, et leur nombre n'atteindre que le vingtième du total des entrées et sorties; on comprit qu'il était plus facile d'aller au devant de la mer que de la faire venir à soi, et puisqu'on était déjà forcé de stationner lors des vents contraires et d'alléger pour les grands tirants d'eau, soit en rade de Paimboeuf, soit en rade de Saint-Nazaire, l'on songea sérieusement à provoquer la création, à l'embouchure de la Loire, d'un grand port où les navires de fort tonnage pussent séjourner ou tout au moins alléger leur chargement à l'arrivée et le compléter au départ , avec la facilité de profiter du premier vent favorable .

 

Tel est le point d'origine de la rapide et toujours croissante fortune de Saint-Nazaire .

 

Mais la solution de la question ne fut pas aussi simple au début qu'elle le parut au premier abord ' ;

( La rade de Saint-Nazaire est sûre et parfaitement abritée, » écrivait en 1823 Edmond Richer dans son Voyage aux environs du Croisic.  Les accidents y sont rares, si ce n'est dans le temps où la Loire charrie les glaçons vers la mer. Peut-être n'y a-t-il pas sur tout le cours de la rivière un endroit plus convenable que celui-ci pour établir un bassin de construction ; il existe sur ce projet un grand nombre de plans et devis : il ne s'agirait que d'établir une digue qui fermerait du nord au sud l'anse qui est située au nord du port. » Nous n'avons rien retrouvé de ce grand nombre de plan» et devis)

et plusieurs années se passèrent en luttes ardentes entre Saint-Nazaire et Paimboeuf, qui , tous les deux, prétendaient obtenir la création du nouveau port .

 

Pendant les deux années 1836 et 1837 , les conseils municipaux et d'arrondissement de Paimboeuf et de Savenay d'où relevait Saint-Nazaire épuisèrent tous les moyens de persuasion pour attirer chacun de leur côté les faveurs gouvernementales .

 

On ferait un volume de toutes les pétitions au ministre des Travaux publics , au Conseil général de la Loire-Inférieure , à la Chambre de commerce de Nantes , de toutes les brochures et de tous les articles de journaux qui émanèrent des deux parts .

 

(Il faut citer en particulier les polémiques publiées dans les deux journaux le National de l'Ouest et le Breton, de 1837 à 1845 On y trouve des renseignements instructifs.)

 

Journal "Le Breton", Nantes parut de 1826 à 1855

Journal "Le Breton", Nantes parut de 1826 à 1855

Atouts de Paimboeuf

 

Paimbœuf, l'un des plus anciens ports de la rive gauche, ville de 6,000 âmes et chef-lieu d'arrondissement, se prévalait contre un petit bourg, où tout serait à créer, de sa situation acquise , de l'ancien projet de Vauban sous Louis XIV , de ses ressources , de ses chantiers de construction , de l'habitude qu'avaient depuis longtemps les marins et les capitaines d'y descendre , de son abri , de l'économie de transport pour remonter à Nantes et surtout de la plus grande facilité de défense en cas de guerre maritime ' .

(« Le célèbre Vauban », disait un mémoire paimblotin , "n'eût pas voulu placer un établissement maritime sur un point destiné à la quarantaine des navires, et qui , situé comme une sorte d'avant- garde à l'embouchure du fleuve, eût été incessamment exposé en temps de guerre aux attaques de l'ennemi . "

Ce fut une semblable considération qui , lors de l'établissement d'un port sur l'Escaut, détermina l'Empereur à préférer Anvers à Flessingue, contrairement à l'avis des ingénieurs ; et l'événement prouva bientôt que le génie de Napoléon l'avait bien servi, puisque la flottille de Flessingue fut brûlée par les Anglais. Or Saint-Nazaire est à Paimbœuf ce que Flessingue est à Anvers.

La position est tout à fait identique ; et dès lors Saint-Nazaire n'offrirait pas moins de danger en temps de guerre que n'en offrirait Flessingue . Il y aurait donc une grande imprévoyance à choisir un point aussi dangereux pour y former un établissement maritime, puisque les bâtiments de l'Etat et ceux du commerce n'y seraient pas en sûreté .)

Saint-Nazaire contre attaque


"La rade de Saint-Nazaire , " disait en revanche une adresse au ministre des Travaux publics volée à l'unanimité contre Paimbœuf par le Conseil municipal de Saint-Nazaire, le 10 mai 1836 :


"La rade de Saint-Nazaire, située à l'embouchure du fleuve, est vaste et profonde ; elle est à l'abri des mauvais vents, et son fond de vase offre un mouillage très sûr ; à l'ouest de cette rade , entre le môle nouvellement construit et la pointe de Penhouët (choisie pour l'emplacement d'un
lazaret) se trouvent deux larges bassins creusés par la nature et que l'on pourrait facilement entourer de quais . Placés sur le bord d'une rade où il n'y a jamais moins de 6 brasses d'eau ( 10 mètres environ) et sur laquelle la mer monte de 13 à 18 pieds (5 à 6 mètres) dans les grandes marées et de 8 à 10 dans les plus petites , ils pourraient être rendus aussi profonds qu'il serait besoin ; mais s'ils n'étaient destinés qu'aux navires de commerce , il suffirait de les débarrasser des vases qui les couvrent sur tous les points . Le courant de l'étier de Méan alimenté par la rivière du Brivet pourrait servir à les nettoyer, etc.

 

" La rade de Paimbœuf est loin de présenter les mêmes avantages. Placée à 1 myriamètre au-dessus de Saint-Nazaire , elle en est séparée par de nombreux écueils . La mer y monte peu , et , dans les grandes marées, il reste seulement à la basse mer 14 ou 15 pieds d'eau (5 mètres) à la partie la plus profonde qui ne peut contenir que 4 à 5 navires . Elle est exposée aux vents du N.-O. , n'est nullement garantie, et son fond de sable n'offre pas assez de résistance aux ancres , etc.

 


Après la construction du bassin de Paimbœuf, les grands navires seraient encore obligés d'alléger à Saint-Nazaire  à cause des écueils et bas-fonds qui s'opposent à ce qu'ils montent avec leur chargement.

(Du 9 mai 1830 au 9 mai 1836 , 160 navires ayant à bord 53,000 tonneaux de marchandises coloniales ont allégé à Saint-Nazaire.)

 

"Enfin Paimbœuf possède déjà des cales et des quais suffisants pour le besoin de sa rade , tandis qu'à Saint-Nazaire il n'existe aucun ouvrage qui permette de charger les marchandises , ni de réparer les navires ...

 

On faisait remarquer encore que l'ensablement progressif de l'ancienne rade dite des Quatre- Amarres à Paimbœuf menaçait de s'étendre jusqu'à compromettre l'entrée du port de Paimbœuf ; et , quant à la question de défense militaire , on démontrait qu'aux époques les plus dangereuses du blocus des Anglais , dont les péniches allaient jusque sous les batteries incendier les bâtiments , aucune n'avait osé se hasarder dans la Loire jusqu'à la rade de Saint-Nazaire .

 

Pendant que les stationnaires de la rivière de Bordeaux ou de Fromentine avaient été enlevés ou brûlés par l'ennemi , seul celui de la Loire n'avait eu rien à craindre .
 

1837 : Le Ministre des travaux publics demande aux ingénieurs d'étudier les deux avant-projets pour choisir en pleine connaissance de cause

 

En présence de cette situation , ordre fut donné en 1837 aux ingénieurs , par M. le Ministre des Travaux publics , d'étudier deux avant -projets de bassin à flot à Paimbœuf et à Saint-Nazaire, pour qu'il pût faire son choix, après les enquêtes locales , en pleine connaissance de cause .

 

M. Plantier présenta les deux projets le 2 août 1837 avec un mémoire fort détaillé , qui résume , de la manière la plus nette et la plus précise , tous les points de la discussion .

 

L'évaluation de chacun des deux ouvrages s'élevait à 1,500,000 francs ; mais M. Plantier donnait l'assurance de ne pas la dépasser pour Saint-Nazaire , tandis que la construction d'un batardeau , fort difficile en Loire pour le bassin de Paimbœuf, pourrait amener des éventualités augmentant beaucoup la dépense .

 

M.Plantier expose le projet de Saint-Nazaire

 

Voici l'économie de son projet pour Saint-Nazaire :


Le bassin devait avoir 500 mètres de longueur sur 100 mètres de largeur avec un radier correspondant à 2 mètres au-dessous des basses mers , afin d'obtenir un tirant d'eau de 5m ,70 en haute mer de morte-eau permettant aux plus grands navires à vapeur alors connus de venir y effectuer leurs chargements et déchargements .

L'entrée devait avoir 17 mètres de large , les plus grands bateaux à vapeur à roues ayant alors 16 mètres .

On disposait un terre-plein d'au moins 14 mètres de largeur autour des quais, et , à 10 mètres en aval des portes , on élargissait le chenal d'entrée de manière à lui donner 40 mètres de largeur à 160 mètres de distance du bassin et à faciliter l'entrée dans les deux sens de la rivière.

 

Les deux murs de ceinture en rivière devaient être fondés sur des massifs de béton coulés dans des encoffrements et arasés à hauteur de basse mer de vive-eau d'équinoxe ; les deux murs appuyés sur la rive devaient être fondés sur des enrochements perdus , arasés à la même hauteur. Nous devons ajouter que M. l'ingénieur en chef Cabrol appuya l'opinion de Plantier qui , après un exposé très complet des avantages et des inconvénients des deux bassins , se prononçait en faveur de Saint-Nazaire .

 

août 1837 : Le Conseil Général de Loire-Inférieure vote pour Saint-Nazaire

 

Le Conseil général de la Loire-Inférieure , dans sa séance du 28 août 1837, exprima un vœu dans le même sens ; et l'enquête réglementaire ouverte pendant deux mois , du 1
octobre au 1er décembre , à la préfecture de Nantes et aux sous-préfectures de Paimbœuf et de Savenay, exprima la même opinion .

 

Saint-Nazaire triomphait.

 

21 avril 1838 : Le ministère entérine Saint-Nazaire  mais .... demande un dernier avant-projet

 

Une décision ministérielle du 21 avril 1838 homologua l'avis de la commission d'enquête , mais demanda , avant de trancher la question d'une manière définitive :

 

1° de prendre l'avis de la Chambre de commerce de Nantes ;

 

2º de rédiger un nouvel avant-projet étudié d'une manière plus complète encore que le
précédent.

"MM . les ingénieurs , " disaient les instructions , " devront entrer à ce sujet dans une discussion approfondie sur les dimensions en largeur et en profondeur à donner à l'entrée du bassin à flot, sur la direction à choisir pour cette entrée, sur l'utilité des quais projetés autour du bassin, et enfin sur les autres dispositions principales des ouvrages mentionnés dans leur précédent travail et qui , s'ils étaient adoptés sans modifications , occasionneraient une dépense bien supérieure à celle qu'ils ont indiquée ."

Nouveau projet de cabrol et Plantier, janvier 1839


Le nouveau projet que présentèrent MM . les ingénieurs Cabrol et Plantier le 5 janvier 1839 et qui reçut l'approbation de la Chambre de commerce de Nantes , dernière consécration du principe de la construction à Saint-Nazaire , ne différait pas sensiblement du premier ' .

(Il est à remarquer que M. Cabrol ayant présenté à la fois un projet de bassin à Saint-Nazaire et un projet de canal de Saint-Nazaire à Nantes, la Chambre de commerce de Nantes se prononça pour le bassin à flot de Saint -Nazaire , de préférence au canal .)

 

Il donna lieu cependant à de sérieuses objections au conseil général des Ponts et chaussées qui pensa qu'il y avait lieu de demander quel inconvénient il y aurait :

1° à rapprocher de la ville le bassin à flot projeté sans en changer les dimensions et en laissant d'ailleurs l'écluse dans la position où elle était projetée ;

 

2º à profiter d'une plus grande partie de l'anse laissée derrière les digues pour augmenter l'étendue du port , soit en reportant davantage vers la côte les digues intérieures , soit en les supprimant , ce qui convertirait en bassin à flot la surface totale de l'anse .

 

Le projet s'enlise en discussions pendant 3 ans , Nantes et Paimboeuf s'opposent au projet !


Trois ans se passèrent en nouvelles études , en rapports de commissions et en discussions interminables .

 

Nantes commençait à craindre le danger pour elle de laisser s'établir à l'entrée du fleuve un nouveau port où
finiraient par se centraliser toutes les opérations commerciales .

 

Devant les oppositions sérieuses qui se manifestaient à Nantes et à Paimbœuf, le ministère semblait hésiter : sans elles le bassin de Saint-Nazaire eût été certainement compris dans la loi du 9 août 1839 , qui autorisait un ensemble de travaux publics .

 

Réveil du projet par Jules de la Gournerie, septembre 1839


M. Jules de la Gournerie , depuis inspecteur général , qui succéda, au mois de septembre 1839, à M. Plantier dans le service ordinaire et maritime de l'arrondissement de Savenay, entreprit de réveiller la question , qui semblait endormie , en publiant un opuscule Sur la nécessité d'un bassin à flot à Saint-Nazaire , auquel répondit presque aussitôt un membre du Conseil général de la Loire-Inférieure par une imposante brochure Sur les inconvénients d'un bassin à flot en ce point.

 

Le ministre vient à Saint-Nazaire, août 1840

Le ministre du Commerce (M. le comte Jaubert) vint lui-même au mois d'août 1840 examiner sur les lieux les
questions pendantes , et une lettre adressée au préfet du département , le 2 février 1841 , par M. l'ingénieur en chef Cabrol , nous apprend qu'il s'exprima ainsi :


"Ce bassin à flot doit s'exécuter en temps de paix , et à plus forte raison en temps de guerre . "

 

1841 La marine militaire appuie le projet

Dans l'intervalle , la marine militaire avait en effet nettement exprimé son opinion sur l'utilité qu'elle devait retirer d'un bassin à flot à Saint-Nazaire , eu égard à ses grands ateliers d'Indret et aux facilités de relâche en Loire ; et la loi du 16 juillet 1840 avait doté en principe l'embouchure de la Loire d'un service postal transatlantique ' , dont la réalisation , par suite de bien des circonstances particulières , ne put avoir lieu que vingt ans après . Cela nécessitait d'importantes modifications dans les projets primitifs .


(Il y a seulement une cinquantaine d'années que l'idée d'appeler la navigation à vapeur au service postal et au transport régulier des voyageurs et des marchandises précieuses reçut une première application en Angleterre . La Peninsular Company ouvrit en 1837 le premier service transatlantique entre Falmouth et Gibraltar, et ne déploya qu'en 1842 son pavillon dans la mer des Indes . Les premiers paquebots de la Compagnie Cunard datent de 1839 .)

Le 18 septembre 1841 , le ministre de la Marine demanda que l'écluse d'entrée du nouveau bassin fût construite à sas , afin de ne pas attendre la pleine mer pour opérer des mouvements qui , au moyen des sas pourraient s'exécuter à mi- marée .

 

 

 

Le projet est entériné définitivement le 2 septembre 1842 malgré un dernier assaut de Paimboeuf contre le projet en mai 1842

 

Les commissions nautiques donnèrent leurs derniers avis au commencement de l'année 1842 , suivies bientôt par la commission mixte des travaux publics , qui exigea de notables modifications et augmentations au bénéfice des services de la guerre et de la marine ; puis, sans tenir compte d'une énergique protestation du Conseil municipal de Paimbœuf qui rédigea , le 24 mai 1842 , « avec toute l'énergie que donne la conscience du bon droit (Ce sont ses propres expressions) , » un long réquisitoire contre Saint-Nazaire , énumérant en faveur de Paimbœuf des raisons de justice , des raisons de prudence et des raisons d'économie , le ministre des travaux publics , par décision du 2 septembre 1842, arrêta définitivement le programme détaillé du nouveau port à établir à Saint-Nazaire .

 

Ce programme comprenait en particulier le raccourcissement de la jetée d'aval du chenal d'entrée , pour démasquer l'entrée du port , et arrêtait à 5 millions le crédit à demander aux Chambres « pour tenir compte des diverses éventualités qui pourraient se rencontrer en cours d'exécution et notamment pour faire face à l'augmentation de dépenses qu'exigerait la construction d'encaissements de fondation en charpente, dans le cas où l'expérience ne confirmerait pas l'opinion de M. l'ingénieur en chef Cabrol sur la possibilité de couler immédiatement le béton dans une fouille à parois verticales ouverte dans la vase à marée basse. »

 

La commission mixte avait de plus stipulé que des ouvrages défensifs seraient adjoints au nouveau bassin à flot, et le chef du génie de Nantes était chargé de rédiger un projet de fortifications qui s'exécuterait en même temps que le nouveau port , mais sur un fonds spécial .

 

Dix huit mois de polémiques, les Nantais réclament des modifications du projet


Dix-huit mois se passèrent encore en remaniements de projets , en vives discussions dans les journaux et
en correspondances actives entre le ministre et l'ingénieur en chef.

 

La production des projets d'établissement de la gare du chemin de fer de Tours à Nantes était venue se
jeter à la traverse et compliquer la question . Un canal maritime et le bassin de Saint-Nazaire à son extrémité
étaient considérés par une grande fraction de l'opinion publique comme le corollaire obligé de ce chemin de
fer, dans l'intérêt du port de Nantes , à l'exclusion même de tout prolongement de la voie ferrée vers l'embouchure de la Loire.

 

L'opposition voyant ses efforts stériles , se manifestait sous une autre forme .

 

Si la nécessité d'un bassin à flot à Saint-Nazaire était admise , des Nantais influents prétendaient qu'on ne devait plus y créer qu'un bassin militaire, comme station de vaisseaux pour la protection de nos côtes et de paquebots transatlantiques à vapeur ; mais ils ne voulaient en aucune façon d'un bassin commercial : les navires marchands qui y trouveraient accès n'y devant pas faire séjour , selon eux , mais passer immédiatement dans les eaux d'un canal maritime aboutissant aux quais de Nantes ".

 

 

La loi du 18 juillet 1845 entérine définitivement le projet en votant son budget

 

Une solution mixte fut enfin adoptée , mais ce ne fut que le 19 juillet 1845 qu'une loi votée par les Chambres
termina cette longue instruction en affectant une somme de 7 millions à la création , dans l'anse de Saint-Nazaire , d'un port d'échouage et d'un bassin à flot , d'une superficie de 10 hectares 50 ares , dont le tiers environ était réservé aux besoins de la marine militaire ou des paquebots transatlantiques .

 

De son côté, le génie militaire faisait approuver des projets de fortification montant à 5.500.000 fr. dont l'exécution devait être confiée aux ingénieurs des Ponts et chaussées . Le total des dépenses de toute sorte devait ainsi s'élever à 12,500,000 fr.

 


Pour l'exécution , M. Cabrol fut nommé ingénieur en chef-directeur, et M. Jégou ingénieur en chef. M. Jules.
de la Gournerie, ingénieur ordinaire de l'arrondissement de Savenay , devait venir s'installer à Saint-Nazaire pour commencer les travaux .

 

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